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Temoignage de MaelCR7


 1. Acceptation de sa transidentité


Ça a été long, certains le savent depuis qu'ils ont cinq ans et il y en a d'autres comme moi qui n'en prennent conscience que plus tard. Pour ma part, je l'ai pleinement réalisé vers mes 20 ans (j'en ai 21 actuellement). Mais quand j'en ai pris conscience, je me suis rendu compte que c'était devant moi depuis toujours et que j'avais fermé les yeux tout ce temps par peur, par honte, inconsciemment évidemment. Comme la plupart, je n'ai jamais aimé les robes, les jeux de filles et tout ce qui renvoyait à la féminité. A l'adolescence, je me suis rendu compte que j'étais attiré par les filles et à ce moment là j'ai mis du temps à m'assumer en tant que "lesbienne" parce que quelque part je savais que c'était bien plus compliqué que ça. J'avais peur de la réaction des gens et j'eus du mal à "sortir du placard". Puis j'ai vécu trois-quatre ans comme ça même si j'avais toujours le rôle du "garçon" dans le couple et que je voulais être perçu comme tel.

J'ai tenté à une période de ma vie d'être féminine : maquillage, cheveux mi-longs, jupes mais j'en ai beaucoup souffert parce que c'était un masque que je portais et même si on me disait que j'étais super "jolie", moi je me dégoûtais et je ne me reconnaissais pas. Je disais souvent à mes conquêtes ou mes amis que je voulais être un garçon, on ne me prenait pas au sérieux, on me disait "oui ça serait cool d'être un mec pour pisser debout." Mais c'était beaucoup plus que ça sauf que je le tournais de façon dérisoire. Pendant toutes ces années j'étais mal dans ma peau sans savoir d'où ça venait jusqu'au jour où j'en ai parlé avec une collègue de travail qui est devenue une amie et qui avait aussi cette volonté de changer, mais elle me disait qu'elle n'aurait jamais le courage d'entamer une transition. Ça a fait tilt dans ma tête et je me suis mis à fouiller internet à la recherche d'une piste m'indiquant par où commencer. J'ai tellement vécu pendant tout ce temps en faisant plaisir aux autres en étant "comme ci" ou "comme ça" que pour la première fois de ma vie, je me suis dit "je dois vivre pour moi". Et après ça ce fut le début de ma renaissance.

Ce qui m'a aidé aussi à me lancer c'est le fait de m'imaginer dans dix ans comment je serais. Je faisais souvent ce "jeu" dans ma tête en m'imaginant à quoi je ressemblerais où j'en serais etc. Le jour où j'ai eu la vision de moi-même portant des tailleurs pour aller au travail avec un petit chignon tirés par quatre épingles, j'ai eu peur et je me suis dit que je me serais tiré une balle bien avant d'en arriver là. J'ai pris les choses en main et j'ai changé mon destin.

 


2. Contraintes administratives et médicales


Beaucoup parlent du psy comme étant une contrainte, mais personnellement je n'ai pas vu ça comme une corvée. Bien sûr la relation est basée sur des mensonges puisque on ne le voit que pour avoir accès aux hormones donc au début c'était pas un plaisir de le voir, mais une fois l'attestation en poche, je me suis livré et il m'a beaucoup apporté. Ça m'a été bénéfique. Pour moi c'est plus le fait de dépendre de la personne sur laquelle on tombe qui est une contrainte, vu qu'il n'y a pas vraiment de loi et que les gens ne sont pas informés. C'est souvent au bon vouloir de la personne pour rectifier la situation, c'est angoissant et embêtant d'expliquer à chaque fois sa situation en priant pour qu'elle soit ouverte.

Exemple : faire un abonnement de train, un abonnement de ciné, de bus, changer sa carte étudiante, retirer un colis etc. Trouver un boulot ! C'est stressant de devoir se dévoiler à un employeur qui peut nous refuser le poste sans nous dire que c'est parce qu'on est "transgenre". De même pour les spécialistes que nous rencontrons, on peut tomber sur des médecins transphobes et ça a le don de plomber le moral. Enfin je vais commencer bientôt le changement d'état civil et j'appréhende les expertises médicales. C'est pleins de petites barrières et contraintes qui nous rendent le parcours encore plus compliqué qu'il ne l'est.

 


 3. Les changements physiques


La testostérone m'a apporté beaucoup de changements positifs qui m'ont donné de l'assurance et de la confiance en moi. D'abord la pousse du dicklit qui m'a permis de ré-apprivoiser cette partie de mon anatomie et en même temps l'arrêt de la période rouge, bien qu'elle n'ait jamais vraiment été très présente dans ma vie.

La mue, c'est un des changements que j'attendais le plus, m'a permis de prendre énormément d'assurance dans la rue ou au téléphone puisque c'est ce qui fait que mon passing est pratiquement parfait.

La pousse des poils : jambes, cuisses, nombril, avant-bras, le début au menton. Avant je n'aimais pas forcément les poils, je n'en voulais pas mais plus ça pousse plus je suis content même ceux sur le torse que je ne voulais pas. Je suis loin même très loin d'être un ours mais ça ne me dérangerait pas d'en avoir plus.

Et puis sinon la musculature (bien que je ne sois pas Sylvester Stallone), la répartition des graisses, les traits du visages plus masculins. Tout un ensemble de détail qui forme un tout plus ou moins viril et c'est ce que je voulais vraiment. J'adore recevoir mon injection de testostérone toutes les trois semaines (j'en suis à sept mois). Et la prochaine devrait être faite seul ! J'ai encore plus d'un an encore pour percevoir des changements et ça me plaît bien.

Bien sûr y'a quelques effets un peu négatifs de la testo : acné, des poils sur les fesses (mon duvet est blond alors ça va), l'agressivité, la fatigue avant l'injection, le sommeil perturbé au début, l'augmentation de l'appétit, la libido assez ingérable au début. Le dérèglement hormonal quoi ! Mais à force on s'habitue et ça se règle !

 


4. Le coming-out familial


La première personne qui ait été au courant de mon envie de changer c'est mon ex qui m'avait aidé à me lancer et m'avait beaucoup encouragé. Suite à ça je me suis coupé les cheveux courts et je suis rentré chez moi, c'était un peu ma façon à moi de faire mon coming-out. J'en avais parlé à mes sœurs un peu plus tôt, comme pour mon "homosexualité" ma petite sœur l'avait bien pris. Ma sœur jumelle a eu du mal, elle avait surtout peur de perdre "sa sœur" mais je lui ai expliqué que je serais toujours la même personne juste avec un physique différent et qu'on aurait toujours notre complicité, une fois rassurée elle s'y est fait.

Bref, du coup ma mère me harcelait toute la journée pour savoir pourquoi j'avais coupé mes cheveux si court en me disant que j'étais horrible. Le 24 décembre, elle est rentrée dans ma chambre en me disant "Tu veux être un garçon c'est ça ?" J'ai fini par dire "oui" tout simplement. Sa réaction a été étrange, je m'attendais à des cris, des pleurs, à être à la porte limite. Parce qu'ils avaient très très mal réagis pour mon "homosexualité". Mais elle a juste soupiré en disant "ouf". Pour elle c'était mieux que je devienne un garçon plutôt que je reste une fille masculine. Soit. Si elle le prenait bien ça m'allait. Mon père m'a pris dans ses bras en me disant qu'il m'aimait. Ça m'a énormément touché toutes ses réactions positives. J'ai fini par le dire à mes frères par messages (ils vivent loin), qui l'ont eux aussi très bien pris.

Puis un coming out à mes amis via les réseaux sociaux. Je n'ai eu que des réactions positives et le tri s'est fait un peu tout seul, soit parce que certains n'acceptaient pas, soit par les aléas de la vie qui font qu'on a des parcours différents mais ça s'est fait naturellement sans douleur.

On pourrait dire "ouah tu as trop de la chance hein ? " Oui j'ai eu énormément de chance, toute ma famille : oncles, tantes, cousins/cousines l'ont bien pris également. Mais c'est ma mère qui a fini par retourner sa veste en me disant que je ne serais jamais un "vrai garçon" et en me lançant pleins de réflexions blessantes. Elle a été pendant de nombreux mois dans le déni, "je dois faire le deuil de ma fille", puis impossibilité d'utiliser le bon pronom ou le prénom que nous avions choisi tous ensembles. Ça m'a énormément blessé, j'ai vécu une période difficile. Puis j'ai décidé de passer outre et d'avancer sans me soucier de ce qu'elle pouvait penser. Encore aujourd'hui elle rigole parfois en me voyant et elle a des réflexions bizarres, je crois qu'elle est dépassée par les événements et qu'elle ne me prend pas toujours au sérieux, elle me soutient mais ses mots et ses gestes sont parfois très contradictoires. Quoi qu'il en soit je ne me plains pas, j'ai plutôt de la chance en comparaison à certains ftm.

 


5. Les relations amoureuses et amicales


Pour les relations amicales comme je l'ai dit plus haut ça se passe très bien, certains ont du mal à parler de moi au masculin mais ils font tous l'effort de se rectifier. Ceux qui n'ont pas voulu faire partie de ma transition ce sont retirés eux-mêmes de ma vie mais ils sont rares. J'ai rencontré beaucoup d'autres ftm et ça m'a fait du bien de me sentir moins seul.

Pour ce qui est des relations sentimentales c'est plus compliqué. J'ai vécu deux ans avec une fille en tant que couple "lesbien" même si je détestais qu'on nous voit comme ça. Quand je lui ai fait mon coming-out, elle a très bien réagi en m'encourageant puis elle a aussi un peu retourné sa veste en me disant qu'elle doutait de ses sentiments, de son attirance pour moi quand j'aurai un corps d'homme et qu'elle ne se sentait pas capable de vivre avec un homme. On s'est séparé. Ça a été difficile. Puis j'ai rencontré une nouvelle fille qui m'a accepté comme j'étais en apparence, mais elle ne voulait pas me présenter à ses amis par honte et m'a présenté à ses parents en tant que fille. J'ai beaucoup souffert de cette relation car je n'étais pas vraiment pris au sérieux parce que je venais à peine de commencer la testostérone. Et donc à chaque conflit, la faute était mise sur les hormones. Puis bref ça s'est mal fini. Aujourd'hui je suis seul et je suis plus heureux comme ça. Je ne doute pas qu'un jour je trouverai la bonne personne qui m'aimera et me verra tel que je suis, en attendant je prends du temps pour moi et c'est aussi bien comme ça !

 


6. Le monde professionnel et scolaire


Je suis étudiant en psychologie, j'ai réussi à changé ma carte étudiante et les listes d'appels à mon prénom masculin, jusqu'à présent j'étais connu en tant que "fille" mais je n'ai eu aucun problème ou aucune remarque négative. Les gens sont assez ouverts dans ma fac et j'ai de la chance. Niveau professionnel j'ai travaillé à côté de mes études dans divers emplois : commis de cuisine, colonie de vacances etc. Ça n'a jamais posé problème que je sois trans, j'ai toujours été pris et considéré comme garçon. Je touche du bois pour que cela continue dans ce sens.

 


7. Peurs, questionnements et doutes


J'ai eu des peurs comme tout le monde avant de commencer : la peur d'être rejeté était sûrement la plus forte. J'avais peur qu'on ne m'accepte pas. Surtout j'avais peur de perdre ma copine, et je l'ai perdu. Ce qui prouve que la peur n'empêche pas que les choses arrivent. C'est humain d'avoir peur mais il faut se lancer parce que quoi qu'il arrive, les choses qui doivent arriver, arriveront.

J'avais toujours peur de faire du mal aux gens. Ma simple existence était un fardeau car je considérais qu'en étant différent je faisais souffrir mon entourage parce que je ne collais pas à leurs attentes, que je ne rentrais pas dans leurs cases et que je ne serais jamais comme ils voulaient que je sois. Mais j'ai appris à relativiser en me disant que je ne faisais finalement de mal à personne et que je n'avais pas à culpabiliser du choix que je faisais puisque je le faisais pour être heureux et que c'est le but de la vie. Une fois que j'ai compris ça, j'ai foncé et j'ai vécu plus libéré, plus épanoui. Mon entourage me le confirme au quotidien en me disant que j'ai changé, que je suis plus sûr de moi, plus heureux, que cela se voit.

Je n'ai jamais douté, pas une seule seconde, de mon choix. Beaucoup m'ont dit "réfléchis bien", "tu vas trop vite". C'est vrai que nous sommes en Octobre 2014, mon premier coup de téléphone à un psy date de Novembre 2013. En 11 mois j'ai eu les attestation du psy, je suis à sept mois sous testostérone, j'ai eu la mammectomie et dans moins de deux mois je devrais faire l'hystérectomie, de plus j'ai déjà contacté une avocate. Bref tout ça en un an.
Mais parce qu'une fois que j'ai pris conscience de tout ça, que j'ai ouvert les yeux, j'ai osé, j'ai pris ma vie entre mes mains et je suis parti à la rencontre du bonheur.

Et vous savez quoi ? Je suis heureux.

Je souhaite à tout le monde d'avoir la chance de vivre un parcours comme le mien qui a été plus ou moins simple et rapide (bien qu'il ne soit pas fini). Mais si j'avais un conseil à vous donner, ça serait : Vivez ! N'ayez plus peur de vivre ou d'être heureux, vivez pour vous et non pas pour faire plaisir aux autres !

La vie est belle. (Peace & love) Complice !


 
Témoignage* de MaelCR7, 21 ans.

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Date de création : Février 2015

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